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Carnets de route

Popayan

Apres une heure de marche qui me permet de couvrir les 5 kilometres jusqu'à la deviation pour Popayan, je sors mon precieux cahier, synonyme d’autostop. Une petite demi-heure plus tard, je me trouve dans une voiture qui s’engage sur la piste entre Isnos et Coconuco. Seulement 100 bornes a couvrir mais tout de meme 4 heures de voyage vu l’etat de la route. Nous traversons le parc national Purace, aussi sublime que dangereux car domaine privilegie des FARC il y a encore peu. Cette fois nous ne croisons que des militaires…

Antes de Isnos - San Augustin 

Une fois a Coconuco, un village entierement indigene du Cauca ou se trouvent de touristiques bains thermaux, nous arrivons rapidement a Popayan, capitale de la region. Je suis recu sur place par Karol et Gabelo, un couple adorable de jeunes artistes/humanistes, chez qui je renoue avec le Couchsurfing. Les deux vivent en centre ville dans un immeuble ou ils cohabitent avec d’autres jeunes aussi sympathiques qu’eux. Je passe donc la soiree avec tout ce petit monde et decouvre les parcours de chacun.

Angela, Gabelo, yo y Carlos - popayan  Karol y Gabelo - Popayan

Je passe ensuite deux jours a visiter la ville en compagnie de mes hotes (le centre d’aspect colonial est joli et tranquille et ne manque pas de sublimes eglises) et a partager d’agreables moments avec la petite communaute de leur immeuble (notamment une discussion collective animee apres un debat televise pour les elections presidentielles de mai prochain et une seance de cuisine francaise peu probante).

Que harriamos sin la religion? - Popayan  Basilica de la plaza central - Popayan  Cocina (casi) francesa - Popayan

Je suis bien triste de les quitter le matin du troisieme jour alors que je me dirige ineluctablement vers l’Equateur.

"Muchas gracias chicos ! Aproveche mucho mi tiempo con ustedes y nos quedamos en contacto para que vayan en Francia un dia!"

San Augustin

A mon arrivee dans cette petite ville je trouve rapidement un hotel bon marche. Je suis le seul client car l’hotel n’est pas officiellement ouvert et je me fais choye par Marina, la patronne, qui me prepare cafe sur cafe et jus de fruits. Le lendemain de ma premiere nuit a San Augustin je me rends au parc archeologique, raison de ma visite ici. Ce parc, inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, abrite des dizaines d’imposantes statues elaborees par une civilisation disparue ayant vecue dans ces montagnes durant le premier millenaire de notre ere.

Je suis absolument seul dans ce vaste parc, ou la nature est aussi attrayante que les artefacts archeologiques, et je papillonne de statue en statue. Aucune ne me sourit et certaines vont meme jusqu'à me presenter des tetes menacantes ou a essayer de m’effrayer en me montrant les dents. Je ne leur ai rien fait pourtant…

Estatua - parque archeologico San Augustin   Estatua...y yo - parque archeologico San Augustin   Estatuas - parque archeologico San Augustin

Apres ma visite, je passe quelques temps a enseigner des rudiments d’anglais aux guides touristiques du parc qui se perfectionnent en l’absence de touristes (saison basse oblige). Pas sur qu’ils en retirent un grand benefice vu mon niveau d’anglais et mon accent « Frenchie » ! Je profite ensuite du beau temps dans  l’apres-midi pour aller me promener du cote d’El Tablon ou se trouvent d’autres statues. J’y fais la connaissance d’une jeune fille qui m’initie au secret du calendrier Maya. Tres interessant lorsqu’on prend la peine de faire la distinction entre mythe et realite. Je finis ma journee a l’hotel, me reposant de mes longues marches du jour, et le lendemain je suis déjà en partance vers Popayan !

Hasta San Augustin

Apres un peu plus d’une semaine passee a Bogota au retour de la Semana Santa, me voila a nouveau sur la route. A Bogota, j’ai le temps de boucler mes travaux pour le CINEP et de profiter encore un peu des actractions de la ville, Montserrate et le Museo de Oro notamment, avant d’enfiler mon gros sac a dos.

Vista desde Montserrate - Bogota  Figura de El Dorado, Museo de Oro (foto de internet) - Bogota

Le jour du depart, je me rends en transport en commun a la sortie sud de la ville. J’ai du mal a convaincre quelqu’un de m’embarquer alors que je tente ma chance depuis une heure a la station service du coin. Enfin, me voila parti, tout va bien.

Mon premier ride en “mula” (gros transporteur) m’amene jusqu’a la base militaire de Melgar, la plus grande de Colombie, et me fait quitter la pluie et le froid de Bogota. A savoir qu’en hiver il pleut tous les jours a Bogota, sans exception aucune!  Bref, content de retrouver le soleil meme si la chaleur est a la limite du supportable… Mon second ride, toujours en mula, est assez atypique. Je vous reproduis la scene qui a donne tous son sens a ce court voyage jusqu’a Espinal:

-         Alors comme ca tu viens de France? Un Francois, ah ah! Et t’as ton permis de conduire?

-         Oui, bien sur, depuis quelques temps déjà.

-         Et t’as déjà conduis un camion de ce genre? (13 tonnes de marchandises quand meme…)

-         Euh… Non. Mon permis ne m’y autorise pas vraiment…

-         (S’arretant sur le bas cote) Et bien il est temps d’apprendre! Prends le volant!

Et me voila au volant de son camion, a rudoyer la boite de vitesse et a effrayer les cyclistes en bord de route (de nombreux professionnels en Colombie)… Ah, ces colombiens !

El chofer loco! - cerca de Melgar

 Une fois a Espinal, j’obtiens mon dernier ride de la journee qui me conduit au village d’El Castilla. Je me mets en quette d’un coin pour camper et je fais ainsi la connaissance d’Enrique. La main sur le cœur, mon homme me propose de venir dormir chez lui. Je fais la connaissance de sa femme Nuvia, de son père et de « la basse cour domestique », soit chiens, chat, poules et canards qui se balladent librement entre nos jambes. Enrique est aussi communicatif que genereux et me regale de ces histoires infinissables jusque dans le lit que Nuvia m’a prepare. Je ne dormirai pas en tente ce soir (aubaine car l’orage sevit durement cette nuit la). Je petit-dejeune avec tout le monde le lendemain avant de poursuivre ma route vers San Augustin.

Enrique y su familia - El Castilla

 « Muchas gracias Enrique ! Espero que ganaste a la loteria con los numeros de mi fecha de nacimiento, ah ah ! Un abrazo a ustedes ! »

Pas le temps de sortir ma pancarte que me voila embarque jusqu'à Neiva. Au passage, j’observe la beaute de ce paysage d’entredeux cordilleres, maheureusement gache par les torcheres des exploitations petrolieres de la region. De Neiva a San Augustin, je procede par sauts de puce et me fais prendre en stop pas moins de 5 fois, dont la derniere dans le fond d’un camion benne. Pas le voyage le plus confortable que j’ai fait jusque la… Enfin, ce marathon de rides a permis de belles rencontres, de bonnes marches entre les rides et la decouverte de paysages somptueux, en particulier le canyon verdoyant pres de Pitalito et les montagnes de basse altitude a l’approche de San Augustin.

El rio Magdalena - cerca de Garzon En la caja de una volqueta! - Pitalito

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Parque Natural Nacional del Cocuy

Le premier jour n’est pas trop eprouvant physiquement mais les conditions meteos ne cessent de changer, passant du beau temps, a la pluie et enfin au brouillard. Mes compagnons, Manfred et James, avancent bien et me regalent du recit de leurs parcours professionnels atypiques et de leurs voyages.

Apres avoir traverse des vallees humides pleines de cactus etranges et grimpe sur des montagnes rocailleuses depourvues de vegetation, nous arrivons en fin de journee pres de la Laguna de la Plaza ou nous campons subjugues par la vue des premiers glaciers que nous apercevons a l’autre bout du lac. La nuit est froide mais nous en sortons entiers.

Cocuy - Laguna de la Plaza  Cocuy - cactuses y pantanos  Cocuy - En la niebla

Cocuy - Laguna de la Plaza

Nous repartons le lendemain en contournant le lac par l’ouest. Memes paysages montagneux ou regnent les moraines abandonnees par les glaciers qui ne cessent de reculer d’annee en annee. On nous predit que dans 20 a 30 ans, les glaciers que nous observons alors n’existeront plus… En descendant un peu, nous revoila a nouveau dans les cactus et les marecages ou nous nous perdons rapidement. Nous mettons deux bonnes heures a retrouver notre chemin qui nous mene jusqu'à la Laguna del Pañuelo. Nous sommes absolument seuls, a 4300 m d’altitude, ecrases par le poids des montagnes environnantes et rapidement transis de froid a l’approche de la nuit. Nuit qui tombe en dessous de zero cette fois-ci et manque de geler mes parties les plus intimes (je parle de mes doigts de pied…).

Cocuy - Lagunillas y nevados  Cocuy - Laguna del Panuelo  Cocuy - Montanas

Reveil glacial le troisieme jour mais toujours sous le beau temps. La premiere ascension nous rechauffe rapidement et nous offre une vue incroyable sur la Vallee de los Cojines. Environnement unique et tout a fait surprenant d’ilots de mousse verte fluo entoures des meandres des cours d’eau qui descendent droit des glaciers. Malgre l’altitude (ou a cause), le soleil tape fort et tout ce qui depasse se fait rotir (promis Maman, j’ai mis de la creme solaire !). Nous traversons cette etrange paysage qui n’a pas sa place au milieu des glaciers et arrivons au pied du Ritak U’wa Blanco, le plus haut pic du parc culminant a 5300 m. Nous campons pres de la Laguna de Avellanal. Cette nuit la est plus clemente et je me contente de trembler normalement de froid, emmitoufle dans mon sac de couchage.

Cocuy - Vista sobre los Cojines y Avellanal desde 4660m  Cocuy - vallee de los Cojines  Cocuy - vallee de los Cojines

Cocuy - La Laguna de Avellanal se mezcla con los nevados

Nous passons de nouvelles lagunes le quatrieme jour avant de penetrer dans une vallee verdoyante qui me rappelle nos cheres Alpes en plein été. Nous dejeunons pres de la Laguna de los Verdes ou commencent a affluer les « randonneurs du dimanche » (je le dis sans aucune animosite). De la, nous passons par de verts paturages qui nous conduisent finalement a la sortie du par et aux premiers refuges de montagne.

Tour des glaciers accompli en 4 jours au lieu de 5 ou 6, nous sommes assez fiers et meritons notre bonne nuit de sommeil a l’hotel apres notre retour a Guican par la route. Les paysages que nous avons traverses etaient tout simplement splendides et nous prenons conscience que c’est aussi ca la Colombie! Apres le Choco, quel changement! Le lendemain, nous ne tardons pas a repartir vers Bogota. Et oui, Jesus a ressuscite, fin des vacances, nous devons rentrer...

"Thank you guys, it was a very nice experience in your company and I'm glad I met you on the road!"

¿Qué hacer para la Semana Santa?

Apres un bref retour a Bogota, je me trouve avoir soudainement une “semaine de vacances” (oui ca sonne bizarre pour un type en voyage depuis 7 mois !) en l’occasion de la Semana Santa (semaine sainte). La semaine sainte est l’opportunite pour tous les chretiens de celebrer la mort et la resurrection du Christ et pour tous les paiens d’avoir une semaine de vacances, bien meritee ou non !

Mon plan est donc de profiter de cette semaine pour aller faire un tour au Venezuela et de revenir en Colombie par le nord est du pays et ses cotes enchanteresses. Le week end venu j’enfile donc mon sac a dos et sort de Bogota en transport en commun. Pres de Sesquile j’obtiens facilement mon premier ride qui m’emmene jusqu'à Tunja. De la, je galere bien plus pour en obtenir un second jusqu'à Arcabuco. Je me rends alors compte que j’avance a l’allure d’une mouette rhumatisante et que je n’arriverai pas a faire le quart de ce que j’avais prevu a ce rythme la. Bon, c’est decide, je voyagerai comme un « touriste classique » pour une fois et je prendrai le bus de bon cœur (enfin presque…). Apres un trajet en colectivo (minibus dont les chauffeurs n’ont aucune consideration pour les passagers ni les autres usagers de la route si je m’en refere a leur manière de conduire !), j’arrive en fin d’apres-midi a San Gil, petite ville agreable dans le creux d’un canyon.

Je fais la rencontre de plusieurs backpackers etrangers et me fait brancher par un francais et un irlandais sur un trek dans le parc national naturel de Cocuy. La proposition est allechante du fait de la soi-disant beaute du site et moins allechante du fait des temperatures glaciales qui regnent la-bas (la surface complete du parc est situee a plus de 4000 m !), des 8 a 9 heures de marche par jour pendant 4 a 5 jours avec des sacs blindes de nourriture et de materiel de camping, et enfin de la realisation de ce defi physique avec des personnes dont je ne connais rien. Parfait, je marche !

Du coup, le lendemain j’ai juste le temps d’aller me promener aux marche de San Gil (les marches sont l’ame d’une ville ou d’un village et on y trouve toujours la nourriture la plus typique et des etalages hauts en couleurs), d’assister au Domingo de los Ramos sur la place centrale et de visiter une grotte souterraine avec Manfred, mon futur compagnon francais de trek, avant de prendre un premier bus pour Tunja (retour a l’envoyeur…) puis un second jusqu'au petit village de Guican.

San Gil - Domingo de los Ramos  San Gil - Cueva de la vaca  San Gil - Cueva de la vaca

 

Nous arrivons a l’aube et passons notre journee a regler les preparatifs. Nous sommes déjà a 2900 m d’altitude, le paysage montagneux est superbe, Guican n’est pas deplaisante et la population locale, des andins avec panchos et chapeau traditionnel, est tres accueillante. Le lendemain, nous partons a l’aube avec le camion de lait (qui sert plus de transport public que de transport de lait a vrai dire) qui nous depose non loin de l’entree du parc. Vamos !

Guican - Plaza central  Cocuy - Un andino frente al camion de leche

Segunda Visita en el Choco

Apres ma premiere visite dans le Choco, je rentre a Bogota pour deux semaines qui me permettent de mettre au clair les observations que j’ai pu tirer de ce premier contact. Je mene ainsi la vie de bureau pendant cette periode (boulot, dodo sans le metro neanmoins) et m’autorise quelques sorties pour decouvrir un peu Bogota. Olivier, mon colocataire et collegue de travail, m’introduit egalement a quelques unes de ces connaissances et je fais ainsi la connaissance de bogotanos fort sympathiques.

Bogota - Plaza de Bolivar  Bogota - calle en la Candelaria

J’ai aussi le temps de me faire braquer la veille de mon second depart pour le Choco. Ce n’est jamais agreable de se faire mettre en joue par des adolescents nerveux et je ne le recommande pas. Cependant, apres avoir offert de bon cœur mes 3000 pesos (environ 1 euro) et ma splendide montre Decathlon a mes voleurs, ceux-ci se repentent (par bonne grace ou par peur de je ne sais quoi, je ne le saurai jamais) et me rendent mes biens. Curieux agresseurs…

Bref, sur ces entrefaites, me voila donc parti a nouveau pour le Choco. J’arrive a Rio Sucio dans une atmosphere humide qui annonce l’hiver et la saison des pluies. Je retrouve mes collegues arrives une semaine plus tot et nous passons deux jours sur place. J’ai le temps d’apprecier leur travail avec l’Association des Conseils Communautaires du Bajo Atrato (ASCOBA), a laquelle le CINEP apporte son aide, et j’ai meme le temps de presenter mes premiers travaux.

Rio Sucio - Ya empieza la temporada mojada!  Rio Sucio - Presentacion frente a ASCOBA

Je passe ensuite quatre jours dans des communautes du Bajo Atrato avec un compagnon du CINEP et quatre representants d’ASCOBA. Le but pour ASCOBA est de se montrer present pour la population et d’engager certaines demarches pour des programmes d’aide locaux. Pour moi, c’est une occasion d’approfondir ma connaissance de la region sous tous ses aspects et de toucher du doigt aux problemes environnementaux des communautes.

Nous partons en jeep sous la pluie. Cette derniere est pleine a craquer et je me retrouve accrocher derriere avec deux « compadres ». Des la sortie de Rio Sucio, nous nous trouvons bloques, comme beaucoup d’autres, derriere un camion enfonce dans la boue. Apres 2h d’efforts et la venue d’une tractopelle, nous finissons par passer. Nous manquons l’accident peu apres suite a l’irresponsabilite de notre chauffeur qui decouvre l’effet d’aquaplaning. Nous arrivons enfin a La Punta a la tombee de la nuit et nous rendons a La Pala, a une demi-heure de marche. La Pala a été debarassee depuis peu par l’armee de groupes armes illegaux, malheureusement le delateur a été tue deux jours avant notre arrivee suite a cet episode. Un rappel puissant du danger latent qui plane en permanence sur les populations locales. Nous dormons dans l’ecole qui possede un sol de beton et un toit entier. Le lendemain, nous reunissons le conseil du village et realisons notre petite presentation, qui va se parfaire au fil des visites, ainsi qu’une enquete sur les possessions territoriales des habitants. Evidemment, ceux-ci ne possedent quasiment rien des enormes « fincas » ou « plataneras » du coin et sont voues a subir la loi des grands proprietaires, legaux ou non…

Rio Sucio - Problemas con un camion de madera en el barro...  La Pala - una platanera

Nous partons en debut d’apres-midi pour Villa Nueva, une communaute reculee composee d’une vingtaine de familles. Apres 2h de marche dans la boue (heureusement qu’on m’avait prete des bottes !) et sous un soleil accablant, nous arrivons enfin. Nous parcourons ce qui un jour fut une vaste foret pleine de vie et qui n’est plus aujourd’hui que paturages et plantations de platanos. Apres un match de foot avec les enfants du village, se profile la reunion avec le conseil communautaire. La reunion a lieu dehors, sous un ciel etoile somptueux. Tres romantique mais peu pratique pour prendre des notes ou identifier son interlocuteur etant donne l’obscurite… Et oui, pas d’electricite ici, soit pas d’eclairage. Nous dormons a nouveau dans l’ecole et nous lavons au lavoir de l’eglise que le dernier pasteur a deserte depuis longtemps, ronge par la solitude.

Villa Nueva - partido de futbal  Villa Nueva - donde ya no hay arboles hay barro!

Nous repartons le lendemain matin direction Calle Larga que nous atteignons apres 1h de marche. Nous repetons notre presentation et retournons en fin de journee a La Plata pour y passer la nuit. La venue de l’hiver est annoncee par les nuees de scarabees qui s’amoncellent pres de toute source de lumiere. Nous dinons le repas devenu notre quotidien depuis trois jours : riz, platano frito et poulet (choisi avec soin a chacune de nos arrivees dans les communautes), avant d’aller nous endormir dans l’ecole. Premiere fois de ma vie que je suis victime de discrimination raciale puisque les enfants du village, qui n’avaient jamais vu un blond auparavant, n’arrete pas de m’appeler « monito » et prennent la fuite a la simple vue de ma criniere jaune !

La Pala - habitacion typica

Nous quittons la communaute dans la matinee et retournons a Rio Sucio en moto, seul moyen de transport a disposition sur le moment. Je me retrouve a la queue d’un cortege de six motos, cramponne derriere mon chauffeur, supportant tant bien que mal les nids-de-poule de la piste gravillonee que mon chauffeur ne se donne pas la peine d’eviter. Nous crevons apres 20 minutes de course.

Mon compagnon d’infortune parvient malgre tout a enfourcher son engin, a cheval sur le reservoir d’essence et a grand renfort de fumee blanche et acre. Je lui propose de retourner a Rio Sucio pour m’envoyer une autre moto ; on ne peut pas dire que les vehicules soient de sortie ce jour la puisque je ne croise personne pendant mon heure de marche le long de la route. Arrive mon nouveau chauffeur qui repart pleine bourre une fois sa marchandise chargee, c'est-à-dire moi et mon fidele sac a dos. Cet inconscient fini a oublie d’apprendre le sens du mot prudence et ce qui doit arriver arrive. A l’entree du village, ne parvenant pas a redresser sa moto, il nous envoie dans le decor et j’ai droit a un vol plane suivi de plusieurs roulé-boulé. Je m’en tire heureusement avec quelques plaies et une jambe boiteuse. Bon, je remercie sans rancune mon chauffeur qui s’en sort indemne et je finis a pied. Retour au bercail difficile mais j’y suis !

Rio Sucio - Dulce noche Foto de un amigo mio...

Nous quittons Rio Sucio le lendemain en « panga » et descendonc l’Atrato jusqu'à Turbo. De la, direction Apartado ou je reste deux nuits (dont une bien trop arrosee qui m'a valu d'expulser violemment mon repas du soir) avant mon vol pour Bogota du lendemain.

Adios le Choco, region dangereuse et tellement complexe mais curieusement si attachante, vivante et intrigante !

Primera visita en el Choco

Arrive fn janvier, debut fevrier a Bogota, je dispose d'une dizaine de jours pour me familiariser avec la capitale, ses habitants, mes nouveaux colocataires et mon travail de volontaire pour le CINEP (qui travaille a "l'etablissement d'une societe plus humaine et equitable en promouvant le developpement humain integral et soutenable") sous le couvert de l'Ecole de la Paix (le lien renvoie vers un resume de la nature de l'association et un condense simplifie de la situation dans le Choco ces dernieres annees). J'integre donc "l'equipe Choco" pour 2 mois 1/2 environ dans le but d'approfondir la thematique environnementale (diagnostic et etat des lieux de la situation sur des problemes telles que l'exploitation du bois, la culture de palme, la gestion des dechets et des energies, etc.) dans les communautes noires du Choco, theme jusqu'alors peu aborde (et pour cause etant donne la severite du conflit arme qui laisse peu de place aux problemes "secondaires").

Debut fevrier nous quittons Bogota pour une visite de quinze jours dans le Choco. Je vais donc pouvoir aller me rendre compte sur place de la situation reelle alors que jusqu'a maintenant je ne me contentais des reportages, souvent superficiels et bacles, prodigues par la presse colombienne en grande partie sous le joug uribiste.

Mapa Colombia con el Choco al norte-oeste, cerca de Panama

Nous atterrissons a Apartado apres deux courts vols Bogota-Medellin et Medellin-Apartado (j'etais oblige, c'etait pour le boulot...) ou nous passons la nuit. Le lendemain, nous empruntons une piste defoncee a bord d'un 4x4 pour rejoindre Rio Sucio, une des plus importante communaute du Bajo Atrato au nord-est du Choco. Mes collegues me precisent que la "piste defoncee" en question est dans le meilleur etat qu'ils lui ont jamais connu, ceci du a la forte secheresse qui s'abat sur la region en raison du phenomene El Nino.

Cerca de Apartado - Vista sobre las plantaciones de bananos  Cerca de Medellin - Vista desde el avion  Bajira - Camino a Rio Sucio

Apres avoir passe plusieurs barrages militaires, nous arrivons a Rio Sucio poursuivi par les gamins du village qui s'accrochent par grappes entieres au vehicule. En sortant de la voiture je suis frappe de plein fouet par la chaleur ambiante. Le village se presente sous la forme d'un amas de bicoques en bois assemblees de bric et de broc et tenant debout par je ne sais quels phenomenes miraculeux. La plupart sont baties sur pilotis car le village est inonde la moitie de l'annee. Aujourd'hui, seule regne la poussiere de la terre rendue aride par ce soleil de plomb qui dure depuis decembre! A noter que les ponts reliant certaines baraques feraient palir d'effroi Indiana Jones lui-meme malgre son experience dans la traversee de ce genre d'obstacles...

Rio Sucio - Calle  Rio Sucio - Vista sobre el rio Atrato  Rio Sucio - Entre las casas

Je resterai ainsi une dizaine de jours a Rio Sucio, me familiarisant avec la culture afrocolombienne et l'etrange ecoulement du temps ici qui n'a rien a voir avec le notre. Etant par nature impatient, j'ai du mal a accepter cet forme de relachement generalise et d'organisation au jour le jour. J'aurais egalement l'occasion d'aller visiter une petite communaute bananiere situee a 3h en aval de Rio Sucio qui fait figure de metropole a cote. A force d'entretiens menes avec quelques acteurs locaux, je me forge une opinion sur la situation generale environnementale. Outre les problemes de la culture de palme et d'exploitation de minerais precieux, aussi bien generateurs de conflits que de problemes environnementaux graves, l'exploitation du bois s'avere un facteur de deforestation important mais aussi de pollution de la terre et des courants d'eau. L'agriculture et l'elevage extensif bases sur le modele du latifundisme sont un desastre et les petites exploitations sont minoritaires. Enfin, la gestion des dechets est tout simplement inexistante et le rio Atrato fait office de decharge a ciel ouvert.

Outre les organisations afrocolombiennes, metis et indigenes qui sont basees a Rio Sucio, et qui se trouvent etre nos principaux interlocuteurs, on trouve de nombreuses organisations internationales reputees (OXFAM, Medecins sans frontieres, etc.) qui suivent le conflit depuis plusieurs annees, une importante presence militaire et on devine la presence insidieuse des paramilitaires dans les moindres rouages du fonctionnement des institutions et commerces. Je rencontre cependant de nombreuses personnes durant ce sejour, dont la plupart ont des qualites humaines remarquables et j'apprends beaucoup a leur contact.

Rio Sucio - Militares en el atardecer   Rio Sucio - Jugos entre amigos  Rio Sucio - Ninos en la calle

Apres cette premiere breve rencontre avec le Choco et ses habitants, nous retournons a Apartado puis a Bogota ou nous attend a nouveau la fraicheur des hauts plateaux.

Hasta Bogota

Arrive a Turbo s'amorce pour moi une course contre la montre pour arriver le plus rapidement a Bogota. La-bas, je dois y rencontrer Olivier, l'ambassadeur de l'Ecole de la Paix pour faire simple, avec qui je dois discuter des termes de ma mission en Colombie. N'ayant que 90 jours dans le pays avant de necessiter un visa, je cherche donc a optimiser mon temps sur place. Je quitte donc mes amis a Turbo, en particulier mes compagnons en deux roues qui ont egalement une longue route a faire.

Turbo - Unai y Istok preparados a partir

Ma premiere experience de stop en Amerique du Sud se passe bien et en debut d'apres-midi j'arrive a Apartado. Je finis ensuite dans le coffre d'un transporteur de bananes qui me depose a l'entree d'une plantation perdue en pleine campagne. J'y rencontre Julian, un jeune colombien habitant le village de Chigorodo situe a quelques kilometres. Celui-ci me propose le gite et le couvert et m'entraine joyeusement chez lui pour rencontrer toute sa famille. La generosite et l'hospitabilite de la famille Agulero me touche et je suis adopte en l'espace d'une soiree. Recu comme un prince malgre mes allures qui sont de plus en plus celles d'un vagabond, je ressens pour la premiere fois la chaleur et la gentillesse colombienne que je croiserai regulierement par la suite. Je dors seul a meme le sol dans une petite piece tandis que la famille se partage deux lits a cinq.

Chigorodo - Familia Agulero

Le lendemain, apres un copieux petit dejeuner et une "douche" au puits, je quitte mes hotes pour faire du stop au niveau des plantations esperant me faire embarquer par un camion transporteur de bananes se rendant a Medellin.  Peine perdue, ce n'est pas l'heure me dit-on, reviens en fin d'apres-midi. En attendant, je pars alors explorer une "finca" avec Alejandro, le plus age des fils de la famille Agulero. Nous longeons successivement d'immenses plantations de bananos et de platanos ainsi que de vastes etendues ou paissent tranquillement de nombreux bovins. Nous visitons aussi une plantation de poivriers ou se trouvent egalement de nombreux fruits exotiques. La visite se termine par un riche repas chez le proprietaire et, pour moi, ma premiere rencontre avec le cafe "enleche".

Chigorodo - Finca pasatiempo, pimenteria Chigorodo - Finca pasatiempo, pimenteria

En fin d'apres-midi je suis de nouveau sur la route sac sur le dos. J'attends deux heures avant q'une opportunite se presente. Entretemps, je suis harcele de questions par une foule d'adolescents sortant de l'ecole et dont je dois repondre aux questions les plus extravagantes. Tellement nombreuse a la fin, cette populace creait un barrage humain sur la route ce qui m'arrangeait particulierement pour arreter les possibles pretendants pour m'emmener a Medellin.

Vers 18h, je suis donc embarque par Rodrigo. Jusqu'a 3h du matin j'alterne periode de discussion ensommeillee et ronflements paisibles contre la fenetre du cote passager. De 3h a 7h sont dechargees les bananes a la plaza Minorista de Medellin et j'en profite pour somnoler dans le camion. Je decide de m'accorder une journee pour me promener dans Medellin, la deuxieme ville du pays, avant de sombrer le soir dans ma chambre d'hotel. Mon premier vrai lit depuis plus de dix jours! Medellin est assez agreable et possede de beaux monuments, la plaza Botero en est la piece maitresse. Malgre tout, je regrette la presence de tant de creve-la-faim, a la rue soit a cause de leur situation precaire soit a cause de la drogue.

Medellin - vista 3  Medellin - vista 2  Medellin - vista 1

Le lendemain, apres etre sorti de la ville et avoir gagne une station-service, je me fais embarquer en camion par Juan qui me depose a Rio Claro, trois heures a l'est de Medellin. La route de Medellin a Rio Claro passe par la cordillere centrale, dont la dense foret est aujourd'hui devastee par la deforestation. A Rio Claro, je me fais ensuite prendre par Nicolas qui accomplit le trajet direct Medellin-Bogota, soit pas moins de huit heures de voiture et deux cordilleres a traverser. Nicolas s'avere un interlocuteur tres interessant bien renseigne sur la situation militaire du pays. Il me decrit donc, avec le maximum d'objectivite, comment guerilleros, paramilitaires, militaires et narcotrafiquants (generalement les guerilleros et les paramilitaires) se livrent une guerre sans merci dans un pays ou la violence quotidienne est maintenant entree dans les moeurs.

Vers 21h nous sommes a Bogota. Un peu perdu dans cette grande ville, je decide de me trouver un coin pour dormir et de rencontrer Olivier le lendemain. Mon sommeil n'est trouble que par le froid (Bogota est a plus de 2600 m) et deux policiers consciencieux. Au petit matin, je deambule au hasard dans les rues de Bogota qui devrait etre ma terre d'asile pour les deux a trois prochains mois.

Capurgana

Puerto Obaldia, dernier bastion de la frontiere sud de l'Amerique Centrale. Nous y sommes recu par de sympathiques militaires qui fouillent minutieusement nos sacs avant de nous envoyer au service d'immigration du village afin d'obtenir nos tampons de sortie du territoire. Service d'immigration qui ressemble plus a une petite echoppe a l'ambiance bonne enfant qu'a un bureau officiel... Apres ca, le defi est de trouver la lancha la moins chere pour nous mener nous et les velos de mes compagnons jusqu'a Capurgana, notre premiere etape colombienne. Apres deux heures d'attente et de tractations, nous embarquons finalement une lancha lourdement motorisee qui nous depose une heure apres a destination.

Obaldia - llegando a capurgana

Premieres dispositions a prendre une fois a Capurgana : obtenir le tampon d'entree en Colombie et s'assurer de prendre un billet de lancha pour Turbo le lendemain. La premiere chose est faite aisement mais nous apprenons que la prochaine lancha est dans deux jours, nous sommes donc condamnes a rester deux nuits dans cette station balneaire aux plages superbes, au rythme de vie le plus tranquille qui soit et a l'environnement naturel richissime. Quelle poisse! Nous refusant a dormir a l'hotel, nous trouvons refuge dans l'arriere boutique du reparateur de bicyclettes du village et nous restons deux nuits chez Roberto qui nous distrait par ses tours de magie (pas mal mais nous n'avons pas le coeur de lui dire qu'il est encore loin du niveau d'un Sylvain Mirouf!).

Capurgana - acampando en el taller de bicicletas

Nous profitons de ces deux jours passes a Capurgana pour nous rehabituer a la terre ferme, a nous ballader dans la foret luxuriante du Choco, a arpenter les plages remplies de jeunes artisans itinerants que d'aucun qualifierait de "hippies des temps modernes" et a boire des bieres au troquet du coin tout ce qu'il y a de plus typique.

Capurgana - vista desde un monte en la selva Capurgana - artesanos sobre la playa

 

Finalement, le matin du troisieme jour, nous prenons la quotidienne lancha pour Turbo, remplie a ras bord, qui nous emmene en moins de deux heures a bon port. Voila pres de dix jours que j'ai quitte Panama Ciudad et c'est la premiere fois que j'ai l'occasion de revoir une bonne vieille route asphaltee!

Islas de San Blas

Me voila donc a Carti avec en tete l'idee de trouver un cargo, transporteur de bananes ou autre, pour me mener a la frontiere colombienne a moindre cout. En arrivant a Carti, j'ai la bonne surprise de tomber sur mon ami Istok, le cycliste yougoslave tourdumondiste que j'ai croise pres de Penonome. Il est accompagne de Unai, un autre cycliste espagnol (enfin basque) du meme calibre (deja 17 mois sur la route!). Les deux sont arrives hier et attendent la meme chose que moi. Je passe deux nuits en leur compagnie attendre que la providence nous tendent les bras. Cela me laisse un peu de temps pour visiter l'ile et faire la connaissance des Kunas, le peuple indigene vivant dans l'archipel de San Blas. Leur statut est tres particulier puisqu'ils ont acquis leur autonomie en 1925 apres une sanglante rebellion et vivent replies sur leur propre culture et leurs coutumes.

Carti - esperando con Istok y Unai en Carti Carti - mujer Kuna trabajando sobre un collare

Jorge, un autre espagnol bourlinguant en Amerique depuis trois ans, nous rejoint en route et nous finissons par trouver un plan tres avantageux pour nous mener a Puerto Obaldia, a la limite de la Colombie. Ce plan consiste a 5 jours de croisiere sur un voilier pour une somme ridicule. La proposition nous vient d'un couple venezuelien ayant fui  les debordements  du regime de Chavez et souhaitant s'installer dans le transport de backpackers entre le Panama et la Colombie, par voie de mer evidemment. Il s'agit de leur premiere traversee et nous jouons le role de cobayes, d'ou le tarif ridicule d'une cinquantaine de dollars au lieu des quatre cents pratiques couramment.

San Blas - Unai y Eilen   Carti - embarqueando sobre el velero MALUCO

Et bien en route mousaillon! Barde le foc, tire la grand voile et direction 39 degres ouest! Non, je plaisante, je n'y connais strictement rien. Enfin, nous passons quatre nuits sur le bateau, longeant les montagnes du Darien recouvertes d'une epaisse vegetation. Je ne peux m'empecher de songer a ce qu'aurait ete une traversee sac sur le dos de cette fameuse foret. Probablement un calvaire dans le meilleur des cas...

San Blas - vista sobre el Darien San Blas - Kuna navegando

Du bateau, tout semble paisible et chacune des iles que nous abordons est un endroit paradisiaque : noix de coco, palmiers, sable blanc et eau azur. Mes compagnons de voyage sont tous aussi adorables les uns que les autres et leurs histoires de voyage m'emerveillent, moi la jeune pousse, la graine de voyageur comparee a ces vieux loups de terre! Nous participons tous au taches quotidiennes et l'entente est parfaite jusqu'a l'arrivee a Puerto Obaldia.

San Blas - una de las 365 islas  San Blas - atardecer sobre la isla

Gracias a ustedes, Jon y Eilen, para este viaje maravilloso y para su atencion. Suerte con el Maluco!

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