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Carnets de route

Between Japanese lessons, hard shopping, outdoor climbing and a new hope for the American education

En attendant le depart pour le Japon, resumons nous sur les derniers evenements en date. Je suis donc reste quelques jours a Buenos Aires chez Maxi a partager mon temps entre vie relax avec lui et ses amis et organisation de la suite du voyage. Le jeudi 10 mars, j’ai dit adieu a Maxi pour la seconde fois en mois de dix jours et je me suis envole pour Los Angeles. Je passerai sur les details d’un long vol avec escale a Mexico et mes problemes de sommeil a bord d’un Boeing. Par contre, je ne passerai pas sur mon arrivee aux Etats-Unis avec fouille minutieuse de mes maigres affaires, prise de mes empreintes biometriques et insistance de la douane a ne pas vouloir me tamponner mon passeport si je ne leur donne pas l’adresse de l’endroit ou je compte rester sur le territoire. M’ont fait payer US$14 juste pour pouvoir passer la douane… De Los Angeles, je prends un bus pour San Diego ou le personnel passe mon sac plastique aux rayons X et n’accepte pas de m’embarquer si je ne paye pas US$10 pour possession d’un couteau suisse qui ira dans la soute de toute facon. Le pire c’est que tout le monde trouve ca normal : « Yeah man, it’s a matter of security, you can still grab it if you get off the bus while it is stopped. You’re in the US, you have to pay ! » Ouais, merci, j’avais remarque… Enfin, après presque 24h de voyage non stop, j’arrive chez Anita et Adrian a San Diego. Je rattraperai mon sommeil en retard sur le confortable tapis dans leur salon.

Aeropuerto de Mexico ciudad

Ca fait maintenant une semaine que je suis ici et je suis somme toute tres occupe. Premierement, je dois constamment suivre l’evolution de la situation au Japon en esperant que rien de pire que les actuels evenements ne se passe. Ensuite, je dois recomposer entierement mon equipement et je passe donc de nombreuses heures a deambuler de boutiques en boutiques pour essayer de trouver le meilleur rapport qualite-prix. Pour ce qui est du sac a dos, du sac de couchage et autres accessoires, je finis par trouver mon bonheur dans un stock de l’armee. Pour ce qui est des vetements, je remercie Nico et Eva qui m’ont envoye des fringues Hi-Tech de chez Patagonia. J’espere qu’elles arriveront a temps ! J’occupe egalement mon temps libre a etudier un peu de japonais avant de me lancer dans mon voyage au pays du soleil levant.

Dans un autre registre, j’avais note le niveau decevant de l’education americaine lors de mon passage dans le pays il y a environ un an et demi. J’ai l’occasion d’approfondir le sujet grace a Anita qui est maintenant professeure dans une « charter school » du centre ville. Une charter school est une ecole publique a laquelle on assiste par choix et non par obligation, mais surtout qui n’est pas soumise aux regles de l’education americaine sous reserve d’un certain niveau de resultats. C’est souvent un excellent moyen de s’affranchir du système educatif traditionnel et nombre de ces ecoles sont fondees par des enseignants, des parents ou meme des activistes ecoeures par l’ecole publique americaine.

Anita enseigne donc a la King Chavez High School (en reference a Martin Luther King et Oscar Chavez, deux figures de la lutte pour les droits civiques aux Etats-Unis) ou la majorite des eleves est d’origine latino (surtout mexicaine). J’en profite pour preciser que de Los Angeles a San Diego, j’ai plus souvent parle espagnol qu’anglais. Cela traduit le changement d’identite en cours depuis quelques annees dans le sud de la Californie. Elle me fait visiter son ecole et me presente a son directeur. Nous tombons d’accord pour que je vienne y faire une intervention dans la semaine. Je revois donc mes fiches et prepare une nouvelle presentation adaptee a mon jeune public (14 a 16 ans en gros). Dans la semaine je me rends donc a nouveau a l’ecole et fais mon show, comme diraient mes amis americains. Le but est de les faire voyager par procuration, de leur montrer l’importance d’une ouverture sur le monde face a l’ignorance, la peur et la violence, de leur faire prendre conscience de la chance que represente la reception d’une education de qualite et de les faire reflechir au passage sur quelques themes centraux tels que la difference culturelle, le voyage, l’ouverture d’esprit, la confiance, etc. Mes quatre presentations ce jour la sont un succes et les questions fusent. C’est un vrai bonheur de voir autant d’enthousiasme ! Les professeurs se sont egalement beaucoup impliques et c’est la somme de tant d’enthousiasme qui me donne espoir en un avenir meilleur pour l’education americaine et mondiale en general. Une autre maniere d’enseigner, une autre maniere de penser.

In KCHS - San Diego

Je reediterai la presentation en espagnol (les precedentes se firent sous la houlette de mon anglais a l’accent francais tres prononce) lundi prochain avant de dire « good bye » a San Diego.

J’ai aussi profite de mon passage a San Diego pour aller faire un peu d’escalade au parc national de Joshua Tree. Al, un ami d’Anita m’y a emmene ainsi que Becca, une autre amie et Adrian. Al a 62 ans mais lorsqu’il commence une ascension il en parait trente de moins ! Il connait par cœur la majorite des ascensions du parc et est, soyons honnetes, un vrai mordu de l’escalade. Le parc est a 2h30 de San Diego, en plein desert, est est parseme de « Joshua trees » (arbres ainsi nommes par les mormons qui les identifierent a une representation de leur messie les bras tendus vers le ciel ; oui, les mormons ont beaucoup d’imagination, comme tous les fondamentalistes parait-il…) ainsi que de blocs de pierres completement insolites. Je suis plutôt fier de mes prouesses comme debutant ce jour-la et passer la journee en bonne compagnie dans cet endroit superbe fut un vrai regal !

Al in "Wonderland Rocks" - Joshua Tree NP  Spider Al - Joshua Tree NP

Struggling in the middle of the line - Joshua Tree NP  Almost at the top! - Joshua Tree NP  Climbing team - Joshua Tree NP  Joshua tree - Joshua Tree NP

Encore un petit week end a San Diego en compagnie d’Anita et d’Adrian, avec qui je passe d’ailleurs une grande partie de mon temps, le lundi prochain et ensuite c’est le depart pour Los Angeles et Tokyo.

J'y vais ou j'y vais pas?

Il n’y a pas si longtemps de cela (le dernier post en verite), jevous avais regale d’un bel examen de conscience sur la conduite a adopter face a des signes consideres comme negatifs ou positifs selon le point de vue personnel de la personne concernee (moi en l’occurrence).

Bien, ceci etant dit, que represente, sur l’echelle de la negativite, un simple vol de votre sac a dos avec tout ce qu’il contenait (aussi important soit-il a vos yeux) compare a un tremblement de terre, un tsunami et un accident nucleaire majeur plongeant un pays dans une detresse abyssale en quelques heures? Oui, pas grand-chose evidemment… La logique voudrait donc que j’adopte a nouveau la technique du lapin de Garenne et que je detale ventre a terre. Neanmoins, cette negativite la n’est pas vraiment pour ma pomme en l’occurrence mais pour tous les pauvres gens plonges au cœur du desastre. J’aime a penser qu’en de telles circonstances, la situation est donc differente.

De plus, en termes purement psychologiques, comment reagissez vous si ca fait déjà plus d’un mois que vous avez l’impression de faire du surplace, plus d’un mois que vous avez le sentiment que le destin vous met des batons dans les roues, plus d’un mois que votre esprit (alors si lucide auparavant, avant d’atteindre ce fichu « bout du monde ») est perdu dans les limbes de l’hesitation, de la confusion et de l’indecision ?

Si l’aeroport de Tokyo Narita n’est donc pas ferme pour cause de nouveau tremblement de terre ou d’amplification de la menace nucleaire, j’atterirai bien a Tokyo le 23 mars. Je ne suis pas totalement fou et je prendrai probablement la route du sud une fois sur place. Aller donner un coup de main dans le nord ? Oui, j’y ai pense, mais c’est de gens qualifies dont on a besoin la-bas, pas de globe-trotters suicidaires.  Donc, a moins de tomber sur une ONG serieuse a Tokyo qui aurait besoin de mes services (que je ne manquerai pas de proposer soyez-en surs), je n’irai pas vers le nord, ce qui était encore mon intention il y a une semaine de cela.

Peu importe les coupures de courant pour rationnement de l’energie, peu importe le manque d’approvisionnement en carburant, peu importe les pastilles d’iode pour le cancer de la thyroide, peu importe les nouvelles secousses sismiques, peu importe… Les cerisiers seront en fleurs comme chaque annee et apporteront l’espoir a ces heroiques japonais.

Pourquoi je retourne a Buenos Aires...

Apres ce facheux evenement deux jours apres mon entree au Chili, je dois prendre une decision sur la suite de mon voyage.

Resumons nous: je n'ai plus d'equipement et je n'ai plus de carte bleue (et oui, elle etait cachee dans mon sac et a disparu avec le reste), mes sollicitations pour trouver un endroit ou loger a Puerto Montt sont infructueuses, apres une rapide prospection il est impossible de trouver un sac a dos et un sac de couchage decents a Valparaiso, j'ai environ un mois (saison de mars a avril) pour trouver une hypothetique embarcation pour le Pacifique avec un minimum de ressources financieres (sachant que meme en tant qu'equipier je devrai participer aux frais a bord et a l'achat de vivres) et l'incertitude de cette solution m'empeche de demander a recevoir ma nouvelle carte bleue a Puerto Montt.

La premiere solution serait de m'obstiner en m'achetant du materiel bon marche et de partir en stop jusqu'a Puerto Montt pour aller y chercher un bateau comme prevu initiallement malgre toutes les complications intrinseques citees ci-dessus. L'autre solution serait de prendre en compte toutes ces signes negatifs et de prendre la tangente. Un an et demi de voyage m'ont justement appris a considerer les "signes", positifs ou negatifs, qui t'indiquent la bonne conduite a adopter. Dans ce cas la, je crois que le message est clairement: "c'est le moment d'aborder un nouveau chapitre mon vieux et de dire "adios" a l'Amerique".

Je decide donc de retourner a Buenos Aires pour pouvoir m'organiser tranquillement dans la maison de Maxi. M'organiser, oui mais pour quoi? Pour mon passage au Japon tout simplement. Apres tout, presque deux ans auparavant je l'avais plus ou moins prevu ainsi. J'ai juste un peu de retard sur le planning!

Je quitte ainsi Valparaiso en bus le soir de mon quatrieme jour dans la ville. Un nouveau rude coup psychologique mais je ne me voyais pas revenir en stop en short, en espadrilles et charge de mes deux sacs plastiques contenant ce qu'il me reste d'affaires, personne ne m'aurait jamais embarque. 26h de bus apres, j'ai a nouveau traverse le continent. Je vous assure que je n'essaye pas d'etablir un record!

J'arrive le samedi soir a minuit dans la capitale argentine et rejoins Maxi encore en train de "murgater". Je suis recu par ce dernier et tous ses amis a force de grandes embrassades. Voila maintenant deux jours que je suis la et j'ai ma feuille de route pour les deux prochaines semaines. Je quitte Buenos Aires le jeudi 10 mars et j'arriverai a Los Angeles le 11 mars. Je resterai une dizaine de jours chez une amie a San Diego et le 22 mars je m'envolerai pour Tokyo. C'est un nouveau voyage qui commence avec son lot d'incertitudes et d'inconnu, a comprendre son lot d'aventures et de rencontres! 

Accident de parcours a Valparaiso...

Vue du bord de mer, Valparaiso ressemble a un chateau de legos, chaque lego representant une maison aux couleurs vives. Depuis la mince cote, la ville s'etend sur de nombreuses collines accessibles par des rues a forte declivite. J'ai en poche l'adresse d'une dame qui habite une grande maison bleue sur le Cerro Alegre (Mont Joyeux), cadeau d'un ami venezuelien d'Ushuaia. Je m'y rends une fois en ville. La maison s'avere le refuge de nombreux etudiants chiliens et etrangers ou de jeunes travailleurs recemment entres dans le monde du travail. Maggie, la proprietaire, me recoit cordialement et m'accomode dans une chambre dans la partie basse de la maison. Une fois accomode, je rejoins Istok avec qui j'avais convenu d'un rendez-vous.

Retrouvailles emouvantes entre deux amis voyageurs et partage des experiences de ces derniers mois. Pour moi, c'est aussi l'occasion de renouer avec les incessantes parties d'echecs que ce barbu de Yougoslave ne manque pas de me proposer et avec les discussions pseudo-philosophiques que nos esprits tortures ne manquent pas d'engendrer. Nous profitons ensemble des plats de fruits de mer que propose la ville et du charme des rues du Cerro Alegre. La ville a ete classee depuis quelques annees au Patrimoine Mondial de l'UNESCO en raison de son architecture et surtout des graffitis qui ornent la plupart des maisons. Certains graffitis sont de veritables oeuvrent d'art qui transmettent parfaitement l'etat d'esprit des habitants de la ville.

Valparaiso  Valparaiso  Graffiti en Valparaiso

A la fin du second jour, alors que je rentre "chez moi" apres une derniere soiree avec Istok, j'ai la bonne surprise de trouver ma chambre devalisee. Mon sac a disparu et pratiquement tout ce qu'il contenait. Mes compagnons d'appartement  n'ont pas eu plus de chance que moi puisqu'eux aussi se sont fait voles. Stoique au centre de la piece, j'ai la machoire crispee et l'estomac noue. Je ne dis rien mais la tempete gronde... Je me reprends peu a peu et me rappelle que par precaution (ou intuition) j'avais cache quelques heures plus tot mon ordinateur et mes papiers sous le seul meuble de la chambre: l'armoire. Je verifie, tout est encore la. La tension commence a descendre... Bien, que me reste t-il a part ca? Ma casserolle, ma gourde, mes livres, mon echiquier, ma trousse de toilette (contenant au maximum quatre ustensiles!), quelques calecons et chaussettes et ma serviette. Apparemment les voleurs n'etaient ni des cuisiniers, ni des erudits et encore moins des coquets (le fait qu'ils aient embarque mes vieux tee-shirts et mes chaussures trouees est un argument supplementaire a cette affirmation). Par contre, je m'imagine qu'ils doivent aimer le camping ; mon fidele sac Quechua allait feter ses dix ans de vie, j'en ai le coeur serre...

La porte fracturee de la maison est maintenant ornee de plusieurs planches epaisses de bois. Je m'interroge encore sur la coincidence qui a voulu qu'un vol ait lieu justement lors de mon passage dans cette maison situee dans un quartier tranquile du centre. Maggie est catastrophee et les autres habitants de la maison depites. Je suis arrive tard et je suis le seul a ne pas avoir encore porte plainte. Je me rends donc au comissariat le plus proche pour la traditionnelle deposition evidemment inutile. Je suis entoure d'une escorte de 5 ou 6 policiers que je divertie avec mes blagues de mauvais gout. Faut pas trop m'en demander a 2h du mat' apres la perte de 90% de mes seuls biens materiels de cette derniere annee et demie. D'ailleurs, ca aurait ete plutot a eux de me divertir!

Cette nuit la je dors evidemment mal et me leve le visage bouffi et les yeus cernes. Je rejoins Istok que je devais revoir pour un dernier adieu avant de quitter la ville. Ce dernier reste chez Malena, une sympathique mere de 4 enfants qui l'acceuille depuis 4 jours. Apres le recit de ma mesaventure, elle m'accepte chez elle pour une nuit pour me donner le temps de reflechir a la suite du voyage. Istok reste egalement pour m'aider a "faire la lumiere dans mon esprit assombri". Apres deux jours et une nuit de reflexion je decide de finalement retourner a Buenos Aires. Retour a la case depart.

Amigos viajeros - Valparaiso  Cambia tu vida! - Valparaiso

Vamos a Chile una vez mas!

Le samedi matin, Maxi m'emmene a 50 km du centre de BsAs, dans la zone industrielle de Pilar. C'est la-bas que se trouve le camion de Luis qui doit m'emmener a Mendoza. Pourquoi Mendoza? Qu'ai-je encore en tete? Ne serait-ce pas le moment de dire adieu a l'Amerique Latine et d'enfin entreprendre la suite du voyage en Asie? Sans doute, mais j'ai un probleme: ma tentative d'embarquement avortee a Ushuaia en direction de l'Antarctique ne m'a apparemment pas suffi. Apres avoir converse avec quelques capitaines de voiliers a Ushuaia, j'en ai retire une information importante: la plupart de ces voiliers remonte sur Puerto Montt (cote Pacifique chilienne) avant d'aller explorer les iles du sud du Pacifique et l'Asie du sud-est. La saison s'etend de mars a fin avril. Pourquoi ne pas aller y tenter ma chance? Je ne suis pas presse et je peux facilement me donner un mois ou deux pour essayer de me faire embarquer comme equipier. 

Me rendre au Chili represente donc le premier pas. Avec Luis, j'arrive a Mendoza dans la nuit du samedi au dimanche apres un voyage abrutissant de 900 km au milieu des plaines du centre de l'Argentine. Je passe la nuit chez Luis qui m'installe dans son salon tandis que lui rejoint sa femme et ses trois petits garcons dans sa chambre. Nous ne sommes pas exactement a Mendoza mais a Santa Rosa, au milieu des vignes et des "bodegas" (lieux d'elaboration et de production du vin) et l'environnement est extremement tranquille et relaxant. Luis m'annonce qu'aujourd'hui il va chez un ami avec sa famille pour un "pollo al disco" (poulet prepare au feu de bois dans une grande marmitte plate avec ajout de nombreux legumes et, au choix, du vin, de la biere ou du cidre pour faire mijoter le poulet en question). Quand je lui dit qu'apres six mois en Argentine je n'en ai encore jamais mange il m'invite evidemment a le suivre. Resultat, en deux temps trois mouvements je me retrouve chez Carlito (qui vit a San Martin), au milieu d'une trentaine d'invites, pour l'anniversaire du beau-fils. Nous sommes tous dans le large jardin, la chaleur est etouffante, mais lorsqu'on est assis a l'ombre a siroter un vin de la region agremente de quelques glacons, tout va tout de suite mieux! 

Pollo al disco con cidra - Mendoza  Domingo en la casa de Carlito - Mendoza

J'etais cense m'esquiver dans l'apres-midi pour entamer le stop vers la frontiere chilienne. Seulement, je commence a etre habitue aux changements de plan et c'est evidemment ce qui s'est passe. La compagnie de tous ces gens, dont la plupart travaille dans la bodega d'a cote, est tres agreable. J'apprends des choses sur le processus d'elaboration du vin et sur les conditions de travail dans les bodegas argentines. Mars est la pleine saison et le travail est continu jusqu'en mai a raison de tours de 12h par jour. Pas facile! La presence d'un francais globe-trotter a la tablee fait aussi des emules et l'ambiance est bon enfant. Avec Luis, nous sommes les derniers a partir. Il est pres de minuit et nous devons dormir dans le camion pour etre a l'heure pour charger le lendemain. 

Apres une chaude nuit dans le camion, je me retrouve a petit-dejeuner avec les mecaniciens de l'entreprise de fret de Luis avant d'etre finalement depose sur la route de la frontiere chilienne par Manuel, un collegue de Luis. J'ai une vue superbe sur la cordillere des Andes avec en premier plan de verts champs de vignes attendant impatiemment les vendanges. Quelques rides successifs et j'arrive enfin a Las Cuevas vers 21h. Las Cuevas est la partie argentine de la frontiere et se trouve a 3200m d'altitude, juste au pied de l'Aconcagua, la plus haute montagne des Andes qui culmine a pres de 7000 m. Il fait un peu frais par ici et je me refugie dans un abri de l'epoque de l'independance argentine. Servant autrefois de refuge aux messagers traversant les Andes, ce soir la il permet a un nouveau voyageur de dormir au chaud.

Cordillera desde Mendoza  Abrigo en la cordillera - Las Cuevas  Caminando hasta la frontera chilena en Los Andes

Reveil a l'aube pour un extraordinaire lever de soleil sur la montagne. Marche rafraichissante de quelques kilometres pour joindre la partie chilienne de la frontiere. Et facile negociation avec un routier nomme Alex qui m'emmene jusqu'a Los Andes, au pied de la montagne. Mon dernier ride jusqu'a Valparaiso s'effectue a bord de la Hyundai d'Alejandro, entrepreneur avise qui me decrit avec passion son pays. C'est drole comme chaque nouvelle entree dans un pays me voit me confronter a LA personne qui connait par coeur son pays et qui n'attend qu'une chose: partager cette connaissance!

J'ai laisse derriere mois l'Argentine pour la derniere fois crois-je a cet instant... Il s'agit de mon treizieme passage de frontiere dans ce pays (entrees et sorties) en environ six mois. Je vais surement devoir changer de passeport dans peu de temps a cause de ca... Je viens de passer d'un ocean a un autre en quatre jours et me trouve maintenant au bord du Pacifique ou le temps est bien plus doux qu'a Buenos Aires. A Valparaiso je dois revoir mon ami Istok avant de foncer vers Puerto Montt pour ma lubie maritime.

Buenos Aires, las murgas y la joda!

Me voila donc de nouveau a Buenos Aires, la geante capitale de l’Argentine avec ses 13 millions d’habitants. Ce n’était pas vraiment ce que j’avais prevu mais mon ami Maxi avait si bien su attiser ma curiosite a propos du fameux carnaval local de « murgas », que j’ai finalement atteri dans la megalopole.

Je loge donc chez Maxi en compagnie de ses parents, Jorge et Claudia, qui m’accueillent comme leur propre fils. D’ailleurs le frere aine de Maxi est en voyage donc ca tombe bien ! Maxi habite Villa Ballester, un des quartiers au nord de la ville et donc loin du centre et relativement tranquille. Ici, rien a voir avec l’architecture ou la vie stressante du centre-ville ; tout y est calme et les pates de maisons succedent aux pates de maisons. C’est un vrai dedale et essayer de retrouver son chemin s’avere un veritable exercice memoriel !

J’arrive un samedi, pile pour une premiere murga a Campana, une ville a 80 km du centre de Buenos Aires mais neanmoins encore rattachee a l’enorme tissu urbain. Je m’y rends avec Maxi et ses amis murgueros. Une rue entiere est coupee pour laisser place au carnaval. Une murga se compose d’un groupe de percussions et d’un groupe de danseurs. Selon la murga, la musique et la danse sont aussi accompagnees de chants et de discours plus ou moins engages. C’est ce qui a valu aux murgas d’etre interdites sous la dictature militaire argentine… Chaque murga appartient a un quartier. Ce sont les gens du quartier qui s’organisent eux-memes pour preparer les costumes, hauts en couleurs, et les representations artistiques. Tout le monde peut participer sans restriction d’age, de sexe, de milieu social, etc. C’est un formidable moyen d’apporter de la joie dans les quartiers defavorises et de canaliser l’energie creative des enfants. Bien que des ateliers se deroulent toute l’annee dans les divers quartiers, le carnaval a lui lieu entre fevrier et mars.

Ce premier soir a Campana, j’assiste donc, entre deux rangs de badauds venus assister au spectacle, a ma premiere murga. Quel sens de la fete ! Quel rythme ! Quelle joie je lis sur tous les visages ! Ces gens vivent leur passion et n’ont qu’une envie : la transmettre au plus grand nombre. La danse est tantot organisee, tantot libre. Ce qui est sur, c’est que chacun se donne a fond au rythme des tambours ! Beaucoup de jeunes adultes mais aussi des gens plus ages et surtout plein de jeunes pousses, parfois a peine sorties de la poussette. La fete m’enchante et je ne suis pas mecontent de remettre ca le lendemain dans un quartier proche de Villa Ballester, quartier  tres mal fame aux dires de Maxi. Peu importe qu’il soit mal fame puisque la fete prend a nouveau place et que chacun oublie ses soucis l’espace de quelques heures pour se consacrer seulement a la musique et a la danse !

Murga en Bilingurst - BsAs  Murga en Campana - BsAs  urga en San Andres - BsAs

Maxi insiste pour que je reste jusqu’au samedi prochain pour assister a « sa » murga. Je ne peux refuser et je reste donc. Maxi a encore une semaine de vacances avant de reprendre les cours et je passe donc une grande partie de mon temps avec lui. Il me presente a ses amis, me fait part de ses (nombreux) projets associatifs ou creatifs, m’emmene dans les endroits sympas de son quartier, etc. Je passe ainsi une semaine relativement relax ou je suis completement pris en charge par Claudia qui s’est mis en tete de me faire prendre du poids. « Y’en a qu’ont essaye, y z’ont eu des problemes ! »

Cumpleano del abuelito - BsAs  Plaza 25 de Mayo - BsAs  El murguero loco!

Vient enfin le grand soir de la murga de San Andres/Villa Ballester. La murga de Maxi a reussi a rassembler cinq murgas differentes ce soir la et deux groupes de musique. Le carnaval dure de 18h a 2h du matin jusqu'à ce que la pluie ne vienne mettre un terme a la fete. Pour l’anecdote, la pluie fut torrentielle et je me suis retrouve a pousser l’auto de Maxi dans une rue transformee en riviere, avec de l’eau jusqu’aux genoux ! Digne d’un film hollywoodien !

Nous passons le dimanche a recuperer de la murga et de notre session de natation urbaine avant d’enchainer sur une nouvelle semaine. Ensuite, le lundi, je donne une petite conference a la Faculte d’Ingenierie. Comme a Ushuaia, les vacances et les examens mettent a mal mon taux d’audience, et je me retrouve a faire une conference directement sur le Notebook avec trois jolies filles de la Fac. Ce n’est pas pour me deplaire finalement… Le soir, je rejoins Maxi a la « Bomba de tiempo » (Bombe de temps) pour une soiree d’improvisation de percussions tout a fait surprenantes au milieu de centaines de jeunes se mouvant a l’unisson au rythme des djembes. Encore une fois, je suis sous le charme des « portenas », les habitantes de Buenos Aires. Tout a la fois malheureuses victimes de la mode et sans nul doute les filles les plus sophistiquees d’Amerique Latine, elles preservent neanmoins un charme naturel et une coquetterie qui laissent reveur.

La Bomba de Tiempo - BsAs

Alors que je suis cense partir le lendemain, Maxi arrive a me convaincre de rester pour aller assister a un match de foot de son equipe favorite. River Plate ? Boca Juniors ? Non, Argentinos Juniors ! Apres tout, je ne pouvais quitter le pays de Maradona sans aller me recueillir dans le stade ou il fit ses debuts… D’ailleurs, le stade porte maintenant son nom. Le vendredi je suis enfin prêt a partir. Ah, encore un faux depart finalement puisque un ami camionneur de Maxi peut m’emmener jusqu'à Mendoza le lendemain. Je profite de ma journee pour assister Maxi dans sa realisation de lutins. En effet, depuis peu, mon ami s’est mis a la realisation de lutins artisanaux qu’il vend lors de ses voyages. A la fin de la journee j’ai donc mon propre lutin qui me suivra lors de mes peregrinations. Il se nomme Simio (Singe), pour des raisons que j’expliquerai peut-etre dans mes memoires…

Dale Argentinos! - BsAs  Duendes! - BsAs  Mi duende Simio - BsAs

Ce soir, derniere soiree avec Maxi et depart demain. J’espere…

J’ai passe presque deux semaines a Buenos Aires et j’ai a nouveau été gate par l’hospitalite argentine. Maxi et sa famille m’ont recu comme un invite de marque et je n’oublierai jamais l’attention que chacun d’eux m’a porte.

“ Claudia, Maxi, Jorge, muchisimas gracias por su alegria y su simpatía! Fue un placer infinito quedarme en su casa y disfrutar de la cocina de Claudia! Sucia, cuidate y cuida a tus viejos, y intenta alcanzar el estado de lobo, sucio simio! “

Jorge, Claudia y Maxi - BsAs

You’re a supersonic man, aren’t you?

Enfin! Ma derniere visite a la DGR est la bonne! Le lundi, je me rends au bureau au bout de la rue San Martin, slalomant entre les touristes au pas nonchalant et les locaux absorbes par leur routine quotidienne. J’ai les papiers necessaires, personne ne me fait de problemes supplementaires et on m’aide meme a remplir ce fichu programme informatique auquel je ne comprends rien. Je passe ainsi mes deux dernieres heures a la DGR en esperant ne plus jamais avoir a y mettre les pieds.

Le reste de la journee, je le passe a saluer les amis (encore une fois) et a m’organiser pour le depart du lendemain. Une derniere soiree arrosee, une tres courte nuit et un reveil difficile avec la gueule de bois, et me voila a la sortie de la ville a faire du stop. Drole de sensation de quitter ce lieu qui m’était devenu si familier. J’y avais des amis, je m’y etais trouve un travail fixe, j’y dormais (plus ou moins) au meme endroit chaque soir et j’avais appris a apprecier Ushuaia avec ses bons et mauvais cotes. Je sentirais presque de la nostalgie…

Mes pensees melancoliques s’effacent lorsque s’arrete Angel dans son camion et la realite de l’instant present fait a nouveau surface. J’arrive rapidement a Rio Grande et, alors que je marche vers la sortie de la ville, je me permets un court arret afin d’aller saluer la famille Baracchi qui m’avait recu trois mois auparavant. A 14h je suis finalement de nouveau au bord de la route a jouer du pouce. Quatre heures de stop en plein vent et dans le froid austral ne suffisent pas a me faire embarquer. Je renonce en me disant que tout vient a point a qui sait attendre. Pour le coup, j’irai « attendre » dans ma tente ou je recupererai de ma nuit passee. Je me reveille a l’aube, pour le lever de soleil au-dessus de la mer glaciale de la Terre de Feu. La maree est basse, les mouettes piaillent en tournoyant furieusement au-dessus de ma tente. Vos gueules les mouettes, la mer est basse !? Hum, les mouettes argentines ne doivent rien comprendre a l’humour francais…

Playa en Rio Grande

A 7h, je me retrouve a nouveau a lutter contre le vent. Finalement, une voiture s’arrete. J’apprends que mon bon samaritain se rend a Neuquen, a pas moins de 2000 bornes de la ! J’avais encore plusieurs idees d’itineraires dans la tete avant ca, et d’un coup ma destination se revele d’elle-meme : j’irai jusqu'à Buenos Aires ! Mon ami Maxi, rencontre au Perou et revu a Ushuaia, m’y a invite pour assister aux « murgas » et m’initier a ce carnaval peu connu des touristes. Je monte a bord et salue Claudio avec qui je m’apprete a effectuer ce long trajet. Ce dernier vient d’achever un travail pour une compagnie petroliere et rentre chez lui. L’air debonnaire, tres relax et communicatif, Claudio me met tout de suite a l’aise et le courant passe facilement entre nous. Nous arrivons a la premiere frontiere de San Sebastian et nous embarquons un autre auto-stoppeur : Martin. Etudiant d’anthropologie a Buenos Aires, il connait par le plus grand des hasards mon ami Maxi avec qui il etudie. Extraordinaire coincidence quand on sait que la capitale compte plusieurs millions d’habitants !

Claudio, Martin y yo cruzando el estrecho de Magallanes

Le voyage se deroule tranquilement dans une ambiance de franche camaraderie que l’etat d’esprit argentin ne manque jamais d’instaurer. Second passage de frontiere pour finalement revenir en Argentine apres ce court episode chilien, avec traversee du detroit de Magellan incluse. A l’epoque du conflit entre le Chili et l’Argentine pour l’occupation de la Terre de Feu, le Pape aurait quand meme pu s’arranger pour laisser un acces direct aux argentins depuis le continent, sans avoir a passer chez leurs voisins chiliens. Sans compter qu’ils se detestent generalement et que les passages de frontiere ne sont jamais tres agreables dans ce coin la.

Un fois a Rio Gallegos, Martin nous quitte pour continuer sa route vers El Calafate. Quant a Claudio et moi, nous remontons a toute allure vers le nord du pays en longeant la cote Atlantique. Nous croisons peu de villes jusqu'à Comodoro Rivadavia. Le paysage est celui d’une pampa aride aux teintes orangees avec l’apparition sporadique du bleu fonce de l’ocean a l’est. Nos seuls compagnons sont les guanacos et les nandus qui pullulent au bord de la route, parfois pour leur plus grand malheur… Nous nous arretons quelques instants a Comodoro Rivadavia afin de me permettre de saluer la famille Martinez qui m’avait recu il y a quatre mois déjà puis nous nous enfoncons dans la nuit, engrangeant a nouveau les kilometres. A 1h du matin, vaincus peu a peu par le sommeil, nous nous arretons dans l’unique village situe entre Comodoro Rivadavia et Trelew, distant de 150 km de chacune des deux villes. La nuit est etoilee, l’air est chaud et nous ne tardons pas a nous endormir, affales dans les sieges avant de la Ford Ranger de Claudio.

Nouveau reveil a l’aube. L’horizon se pare d’un bandeau de lumiere rosacee tandis qu’au-dessus de ma tete les etoiles scintillent toujours. La beaute des levers de soleil dans la pampa ne cesseront jamais de regaler mes yeux. Nous passons au large de Trelew (desole Julien, pas eu le temps de te saluer, et de toute facon tu etais surement encore en train de baver sur ton oreiller a cette heure la !) et faisons une halte a Puerto Madryn pour rendre une visite au frere de Claudio. Pas de chance, il est en voyage, et nous repartons donc sans plus attendre. Je conduis jusqu'à Las Grutas tandis que Claudio prend un repos bien merite. Nouvelle halte dans cette station balneaire branchee, situee dans la baie au nord de la peninsule de Valdes. Rapide visite a la famille de Claudio en vacances ici, et nous allons ensuite faire trempette et manger un bout avant de repartir. La plage est belle, l’eau est chaude et la chaleur est relativement supportable. Je comprends le succes de ce lieu qui commence a etre victime du tourisme de masse.

Playa en Las Grutas

Encore quelques centaines de kilometres, ou j’observe enfin un verdissement du paysage et l’apparition de quelques arbres, et nous arrivons a Choele Choel ou me depose Claudio. Je viens de battre mon record de kilometrage avec le meme vehicule, environ 2000 km ! Je quitte Claudio apres une franche embrassade tandis que ce dernier s’en va vers l’ouest. De mon cote, je me prepare pour le stop. La chaleur me tue et le soleil fait virer mon pale visage au rouge en un rien de temps. Quelle difference avec Ushuaia ! Ici l’ete ressemble vraiment a l’ete !

Je n’attends qu’une heure avant que Julio ne me prenne dans son camion. Il m’annonce qu’il se rend a Olavarria, en plein milieu de la province de Buenos Aires et de la pampa humide. Julio est un jeune camionneur qui vient de se lancer avec son frere dans le transport de fret. Nous passons Bahia Blanca alors que tombe la nuit et je reste muet face a cette maree lumineuse qu’est le premier port du pays dans l’obscurite. Malgre le mate, qu’en tant que copilote je sers avec enthousiasme, je tombe de sommeil et tente malgre tout de faire la conversation a Julio pour me rassurer en pensant que ca lui evitera de nous envoyer dans le decor. A 2h du matin nous sommes a Olavarria. Nous stationnons a la fabrique de ciment ou Julio doit decharger les tonnes de pierres blanches qu’il transporte dans la matinee. Nous dormons dans le camion d’un sommeil lourd.

Le lendemain, le frere de Julio qui vit en centre-ville nous rend visite. Vient ensuite le moment de decharger le camion et j’aide alors Julio dans cette tache besogneuse. Nous ne quittons la fabrique qu’a midi. Julio, qui vient de recevoir l’ordre pour sa prochaine destination, me propose alors de me deposer dans sa ville, a Chivilcoy, ou il passera la nuit. J’accepte et il ne nous reste plus qu’a charger le camion, de sacs de ciment cette fois, avant de reprendre la route. Nous attendrons jusqu'à 18h. Le temps de manger un bout, de prendre une douche, de faire une sieste et de partager une nouvelle fois le quotidien de mes amis camionneurs. Le camionneur a beau etre macho, rustre, souvent peu eduque et parfois tres penche sur la boisson et la misogynie, il reste tres attachant, genereux et parfois meme sage. Je crois qu’a ce jour je pourrais ecrire un recueil sur les us et coutumes des camionneurs d’Amerique !

Julio y Ruben frente al Scania

Il est 22h, nous arrivons a Chivilcoy. C’est l’anniversaire du petit frere de Julio et le traditionnel asado est déjà prêt. Vient s’ajouter le Fernet Coca a la nourriture et le typique tableau du repas argentin est complet. La coutume veut que le garcon fetant ses 18 ans ait la tete rasee par ses amis et cette soiree ne fait pas exception. Il est déjà 2h, Julio insiste pour sortir, vendredi soir oblige. Fourbu, j’accepte avec reticence d’aller descendre une biere dans un bar du centre. A mon plus grand desarroi, Julio est inarretable ce soir-la et parvient a me trainer au « boliche ». Le bonhomme est marie, sa femme travaille d’ailleurs ce soir la a quelques pates de maisons de la boite de nuit, mais ca ne l’empeche pas d’aller solliciter les trois quarts des filles du club avec l’objectif tres clair de finir avec l’une d’entre elle pour une nuit de sexe sauvage. Mouais… Vers 5h30, j’arrive finalement a lui annoncer, entre deux verres de Fernet, que je m’en vais et je rentre a pied rejoindre son camion ou je m’affale trois heures afin de me reposer.

Au petit matin, revient Julio qui a finalement obtenu ce qu’il voulait, et il m’accompagne a la sortie de la ville pour ma derniere seance de stop avant la capitale. Place dans une station service ombragee au personnel sympathique, mon exercice de stop s’apparente a une tranquille matinee d’été passee a discuter avec de vieux amis. Arrive finalement un 4x4 flambant neuf dans lequel se trouve Martin et ses deux enfants qui acceptent de me mener jusqu'à la capitale. Le trajet de deux heures avec cet homme cultive et curieux, aux racines tres diverses et a l’histoire peu banale, finit d’achever cette session de stop de quatre jours, pittoresque et riche en rebondissements, qui m’aura fait parcourir plus de 3000 km en moins de cinq jours !

Cerise sur le gateau, Martin me propose de dejeuner avec lui dans la semaine et me depose prêt de chez Maxi sans oublier d’insister pour m’offrir a manger avant de nous quitter. Je ne sais pas ce que me reserve la suite de mon voyage mais je sens que je vais regretter le sens de l’hospitalite argentin…

Ciao Ushuaia!

Suite et fin (?) de mes aventures dans le labyrinthe de la bureaucratie argentine. J’ai finalement reussi a passer outre les 45 jours d’attente de reception du CUIT et j’ai finalise mon inscription a l’AFIP. Evidemment, il y a toujours un fonctionnaire qui vous dit blanc tandis qu’un autre vous dit noir, vous entrainant ainsi d’un etat d’abattement extreme a celui d’espoir de voir enfin le bout du tunnel de cet imbroglio administratif.

L’obstacle de l’AFIP passe, je m’attaque a la DGR. Mes deboires avec l’AFIP m’ont servi et j’ai anticipe la demande habituelle de documents. Pas de chance, vient s’ajouter un logiciel a la paperasse. Je mettrai plusieurs jours a remplir un formulaire informatique obscure grace a l’aide du comptable de mon employeur.  J’ai enfin mon statut de « monotributista ». Premiere victoire ! Je me fais rapidement un talon de facturation a mon nom, operation qui pourrait comporter son lot d’humour en d’autres circonstances, et je fais ensuite LA facture essentielle a mon employeur pour eviter l’amende de l’AFIP. Il s’agit en fait de faire passer mes heures de service au restaurant comme un service d’une entreprise exterieure finalement facture trois mois apres. Ou en bref, comment legaliser un service illegal sous couvert d’un statut reconnu mais inadequat a ma situation de simple employe. On est en Argentine, ne cherchez pas a comprendre…

Francia y Argentina, misma lucha! - Ushuaia

Il s’agit maintenant de me debarrasser de ce statut si je ne veux pas accumuler des impots dans un pays que je souhaite quitter sous peu. Facile, il me suffit de recuperer le « libre de deuda » (litteralement « libere de toute dette ») dans une annexe de la mairie et de me diriger avec le precieux sesame a la mairie meme cette fois. Une fois la bas, je dois obtenir le justificatif fiscal qui me permet enfin de pretendre a la declaration de la Mairie stipulant que je n'exerce aucune activite commerciale , document qui m’autorisera a redevenir simple vagabond sans attache, fiscale ou de quelque autre nature. A noter que je suis bloque jusqu’au lundi puisque, compte-tenu de leurs emplois du temps surcharges, ces messieurs dames de la DGR ne peuvent realiser l’operation qui me concerne que les lundis et mercredis. Au secours, le monde est fou ! Je partirai donc le mardi 08 fevrier, enfin j'espere...

A part ces deboires administratifs, je suis passe a un cheveu de m’embarquer pour l’Antarctique lorsque, grace a une amie philippinienne travaillant sur un de ces enormes bateaux de croisiere visitant regulierement Ushuaia, j’ai reussi a avoir une entrevue avec le sous-commandant du Cleyra. Cet autrichien longiline et aimable me recoit et m’informe qu’il a besoin en urgence d’un serveur. Parfait, je suis maintenant un serveur experiemente et aguerri ! Seul hic, une tonne de papiers est necessaire pour s’embarquer sur ce type de bateau et contourner la paperasse semble plutôt complique dans ce cas la. « Je dois contacter mon employeur a Monaco et je t’appelle demain pour te confirmer ton embarquement » m’informe t’il finalement.

Alors que je fais la queue a l’AFIP le lendemain matin en attendant qu’on s’occupe de mon cas, je recois l’appel tant espere mais la nouvelle n’est pas a la hauteur de mes esperances. La compagnie a refuse pour des raisons de securite ou de sante. Bref, une raison obscure liee a des problemes de paperasses. Je fais alors appel a ce moment la a tout mon self-control pour ne pas maudire l’ensemble des administrations publiques et prives du monde entier. Le plus drole est que j’avais du dire au revoir a plusieurs amis la veille dans l’hypothese de mon depart puisque je n’aurais pu les saluer par la suite…

Falsa partida... - Ushuaia  Asado en la pension - Ushuaia

Enfin, ma deception passee, je me reconcentre sur la presentation proposee a l’Alliance Francaise d’Ushuaia. Apres plusieurs jours de preparation, arrive finalement le grand jour et je suis chaleureusement recu par Stephane, le directeur de l’AF. Ce jour-la se pointent finalement trois peles et un tondu pour assister a « l’evenement ». A titre de comparaison, organiser une telle rencontre a cette periode de l’annee en Argentine pour des etudiants de francais reviendrait a essayer de regrouper des cadres d’EDF pour une reunion extraordinaire en plein mois de juillet. Je comprends donc le manque d’affluence. Neanmoins, l’experience fut tres interessante et j’espere pouvoir la renouveler aussi souvent que possible.

Conferencia a la Alianza Francesa - Ushuaia

Vient enfin le moment de dire au revoir atout le monde. D’abord les amis au cours d’une soiree arrosee et placee sous le signe de la salsa, la cumbia et autre quartetto. Puis, les collegues de boulot pour lesquels je suis alle jusqu'à cuisiner des gateaux. Mon amie Teresa ne m’a d’ailleurs pas cru quand j’ai dit qu’ils etaient de moi, puisqu’en trois mois a Ushuaia mes performances culinaires n’avaient pas depassees l’œuf sur le plat… Quelques visites a des voiliers en transit dans le port, une rando par-ci, un foot par-la, une visite quotidienne a la DGR, etc., me permettent de patienter en attendant de quitter la ville.

Pasteles! - Ushuaia

Maintenant, j’ai les pieds dans les starting blocks ; je dois encore regler certains details de paperasseries et je file ensuite vers le nord par l'aride cote atlantique de l'Argentine, loin des splendides paysages de la Terre de Feu.

Atardecer en Ushuaia  Arcoiris - Ushuaia  Vista desde el Cerro del Medio - Ushuaia

Vos papiers s'il vous plait!

A l’aube de cette annee 2011, j’ai enfin eu la plaisante surprise de me familiariser avec l’administration argentine. Depuis le temps que j’en revais !

Je regrette parfois d’etre trop honnete par nature, ca m’attire souvent des ennuis… Le jour ou l’AFIP (Administracion Federal de Ingresos Publicos) est venu a mon lieu de travail pour un control de routine ne fait pas defaut a la regle. Travaillant evidemment « au black » depuis debut novembre (ce n’est pas de la mauvaise volonte mais la somme de papiers demandee par le service d’immigration argentin m’avait rapidement ôté toute velleite de regulariser ma situation), l’AFIP ne m’a laisse aucune chance ce jour-la. Enfin si, une, celle de mentir sur ma date d’entree dans le restaurant en rajoutant que je ne suis qu’a l’essai. Je n’ai pas saisi cette opportunite. Que les moralisateurs qui appuient qu’il faut toujours preferer la verite au mensonge aillent precher ailleurs !

Bref, la seule alternative qui me restait a partir de ce moment la était donc de regulariser au plus vite ma situation sous peine d’une tres grosse amende pour mon employeur. Premier detour par le service d’immigration ; apres de nombreux pourparlers,  j’apprends qu’il existe finalement un accord entre la France et l’Argentine qui me permet de travailler 90 jours dans le pays grace a une note speciale sur le passeport, realisee par la douane. Il s’agit de mon seul sauf-conduit car il me serait impossible de regrouper les documents exiges en peu de temps dans le cas contraire. Resultat, le lendemain, je me fais remplacer au boulot et part en voiture avec mon employeur et sa femme jusqu'au poste frontiere de San Sebastian… a 350 km d’Ushuaia. Apres une journee agreable en voiture a travers tantot la montagne, tantot le « paramo » borde par une mer agitee, nous revenons finalement en fin de journee a Ushuaia avec le precieux sesame obtenu non sans difficulte aupres de douaniers bornes mais neanmoins sympathiques. Ce soir la, je camperai au parc national pour un asado au grand air.

Le debut de la semaine suivante, qui marque mes derniers jours en tant que  « serveur du bout du monde », s’engage alors une course a l’obtention de mon droit de travail en sol argentin. Le lundi je passe a l’ANSES (Administracion Nacional de la Seguridad Social) afin de me créer un CUIT (clee d'identification fiscale). Une photocopie par ci, un coup de tampon par la, je ne m’en sors pas trop mal. Le mardi je passe a l’AFIP afin de prendre connaissance des besoins de ces gentlemen pour me delivrer le statut de « monotributista » qui devrait me permettre de « blanchir » ma situation. J’ai donc encore besoin d’un certificat de domicile ratifie par la banque de mon proprietaire ainsi qu’un acte notarial permettant de confirmer le dit document. Heureusement, grace a l’aide de Daniel, mon employeur, ces papiers sont obtenus rapidement et je me presente a l’AFIP de nouveau le lendemain. Surprise ! Au moment de l’inscription, j’apprends qu’il me manque encore une autorisation ecrite par le service d’immigration et un certificat de domicile de la police locale pour pouvoir completer le processus. Je me charge donc d’obtenir ca le lendemain et de retourner a nouveau voir les tetes connues des gens de l’AFIP. Tout est en ordre a premiere vue. Seul petit probleme, l’ANSES n’a pas encore integre mon CUIT au système et l’ecran prehistorique de mon interlocuteur de l’AFIP affiche froidement « contribuyente no existente » ! Bon, retour a l’ANSES pour regler le probleme. Probleme qui semble tout a fait normal pour eux puisque, apres creation du CUIT, le delai avant l’integration au système de securite sociale peut atteindre 45 jours ! Je suis donc bloque en attendant…

Bilan, je vais sans doute devoir faire une procuration a mon employeur pour qu’il se charge de finaliser l’inscription aupres de l’AFIP et qu’il aille ensuite voir la DGR (Direccion General de Rentas) qui se chargera de me faire payer des impots et de mettre fin a cet interminable processus admistratif. Moi qui pensait que l’administration francaise était compliquee…

Je suis evidemment passe sur les heures de queue dans les divers etablissements visites, les discussions enlevees sur les rouages de l’administration argentines et mes courses entre les differentes institutions. Une veritable mise en scene kafkaienne…

A part ces petits desagrements, ma vocation de serveur s’est achevee le week end du 22 et 23 janvier. Je m’attache maintenant a preparer une presentation pour l’Alliance Francaise d’Ushuaia (grand jour le 29 janvier) et a profiter un peu de mon temps libre dans la ville. Depart d’Ushuaia prevu pour le 02 fevrier avec le nord en ligne de mire si aucun changement ne survient.

En bref...

Depuis peu j’ai l’etrange sensation de me faire aspirer dans le rythme infernal d’une vie citadine, sedentaire avec a la fois, et paradoxalement, son lot de labeur et de frivolite.

J’ai fait un choix, celui de me sedentariser quelques mois pour souffler un peu, de m’integrer pleinement a la vie autochtone et, accessoirement, de me permettre de renflouer les caisses pour la suite du voyage. Il se trouve, par le plus grand des hasards, que je suis arrete a quelques 1000 km de la pointe nord est du continent blanc et evidemment l’occasion est trop belle pour ne pas essayer d’en profiter. Je tente donc ma chance regulierement aupres de la marina et des voiliers en partance pour l’Antarctique et je ne manque jamais de glisser un mot a un contact sur un paquebot ou un bateau de croisiere pour augmenter mes chances de faire du bateau-stop, avant ma remontee vers le nord du continent americain. Du moins c’était l’idee jusqu'à il y a peu…

Entraine par le rythme du travail et des regroupements nocturnes (ou diurnes mais tardifs, en rapport avec la duree du jour a cette latitude) avec la belle bande d’amis que j’ai eu la chance de rencontrer ici, j’ai l’impression de reproduire le schema d’une existence que j’avais fui un certain mois de septembre 2009. Je finis la journee sur les genoux (10 a 11h de boulot physique non-stop) et profite de mes soirees pour partager de bons moments avec Maria, Teresa, Mauricio, Juan, Yvan, Rolando, Corinne, Fredo et bien d’autres. Ce n’est pas pour me deplaire mais pendant ce temps-la l’illusion de l’Antarctique s’eloigne petit a petit.

Arriba de nuestro barco abandonado, frente al mar y con sol! - Ushuaia  Entrado al PN gracias a Teresa! - PN tierra del Fuego  Bonita playa en Ushuaia!

L’entree dans 2011 s’est fait de manière laborieuse puisque j’ai travaille jusqu'à 5h du matin le soir du reveillon apres avoir servi pendant plusieurs heures des couples, des familles, des amis venus feter la nouvelle annee autour d’un riche repas et de bonnes bouteilles de champagne. Reproduction a l’identique de ma soiree de la veille de Noel… Experience interessante cependant qui fait prendre la mesure de cette chance que j’avais eu jusqu'à maintenant de passer ces fetes en famille ou avec mes amis, ou bon me semblait et de la manière que je souhaitais.

Navidad con los companeros de trabajo - Ushuaia

Quelle chance de pouvoir se dire : « tout ceci est temporaire ; je suis la parce que je l’ai decide et si je veux m’en aller je n’ai qu’a franchir le seuil de la porte ! » Je pense a mes collegues de travail qui n’ont pas forcement cette chance.  En tout cas, c’est donc ce que je m’apprete a faire apres avoir accompli mon objectif de me poser jusque fin janvier, puisque le 23 du meme mois je m’arreterai de travailler et profiterai d’une dizaine de jours supplementaires a Ushuaia, libre de toute obligation cela va de soi, avant de reprendre la route.

« La vie n’est pas un restaurant mais un buffet, levez-vous pour vous servir » scandait Dominique Glocheux en son temps. Je crois qu’il est temps pour moi d’arreter la diete et de retrouver mon appetit, un feroce appetit.

Atardecer en Ushuaia, extraordinario!  Atardecer en Ushuaia, estupendo!

Ah, et pour l’anecdote, je suis passe le 31 decembre dans le « journal du bout du monde » (Diario del fin del mundo), ce qui consiste en ma deuxieme experience de ce type apres Trujillo au Perou. 

En el diario del fin del mundo! - Ushuaia

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